Etendue dans le lit, toute lumière éteinte, elle s'imagine les étoiles sur la plafond clair...

Doucement elle s'enfonce dans un ciel de volutes blances et de points scintillants, des nuages célestes légers comme des doudous de cotons flottent autour d'elle. Un vent nocturne et doux fait voleter sa longue chemise de nuit blanche sans bruit comme la voile d'un navire. Loin en dessous des villes, tâches de lumières, brillent comme un bal de lucioles.

Et bientôt elle voit la mer s'étendre sous elle, noire comme de l'encre, brillante comme un champ d'éclats de verre dans l'obscurité. Dans ses oreilles le bruit des vagues qui roulent les unes sur les autres et se poursuivent dans une infinie lenteur.
Une voile déchire parfois l'immensité de ténèbres qu'elle survole, et chacun de ces vaissaux ravive l'espoir de revoir ceux qu'elle attend, ceux qu'elles attendent toutes, là-bas. Tous ces marins dans des hamacs ou des draps qui sentent l'homme rêvent à présent, à des femmes, des pays, des familles, de l'or, elle ne sait pas. Mais elle, c'est pour eux tous qu'elle prie chaque soir et chaque fois que de lourds nuages noirs s'annoncent à l'horizon...

Et puis les étoiles s'éteignent, et le plafond revient, des larmes roulent sur la joue. Il fait encore nuit dehors et il se passera longtemps encore avant que son père son frère et son ami ne reviennent.
Maman repose dehors et les plaintes de la bise se font plus fortes depuis que la crois est là.

Elle se lève et s'habille attache ses cheveux dans un faux chignon qui tombe, il faut partir où on l'attendra à l'atelier. Ses mains usées glacées par le vent, elle souhaiterai qu'on la laisse marcher dans les cieux, que le soleil ne se réveille plus jamais.