Ne m'oublie pas. Ne m'oublie pas seule. Ne m'oublie pas dans la fatigue, dans le froid, dans la faim.
Ne me laisse pas debout sur une grande place vide et froide de l'hiver qui vient. Pense à ne pas ma laisser seule dans ce noir qui tombe, au milieu de ce vent qui enveloppe et refuse de lâcher prise. Le froid amène les loups, le vent en est un, le plus grand, le plus noir, le plus féroce, quand il a pris sa proie, il ne la lâche plus. Ne le laisse pas me mordre, pense à venir.
Ne m'oublie pas les lèvres bleues, les dents claquants à petits coups rapides et secs. Ne m'oublie pas mourante sur une grande place. Viens me chercher avant, je suis là, j'attends que tu viennes, mais viendras-tu? Je ne sais plus, j'ai peur de rester là, debout, glacée. Au beau milieu de cette grande place sombre d'où on entend le loup des collines hurler, hurler jusqu'à la mort, hurler jusqu'à ce qu'il vienne, jusqu'à ce que les étoiles se soient éteintes.