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Drought
Les bras croisés derrière la tête, allongé dans cette foutue herbe qui sent horriblement bon la pluie, il regarde le plafond du monde dans son manteau de nuit. Au loin on entend les canons gronder, et les balles siffler l'air, mais c'est loin, si loin.
Il imagine là-bas, comme ça doit être rouge et sanglant, comme il doit y avoir du noir et de la boue partout. Et lui, il est là, il regarde le monde s'achever une nouvelle fois, c'est beau quand même, "c'est terriblement romantique", comme elle aurait dit si elle avait été là.
Il avait voulu l'aider, si jolie si fragile. Si aimée, surtout, il avait donné tout ce qu'il avait sur le moment. Ca faisait pas grand chose, c'est vrai, mais c'était tout quand même. Il y avait eu des rires, de l'amour, des regards, des mots, des gestes, et plus encore, et puis elle avait l'air mieux. Ou peut-être qu'il n'y avait pas que l'air, il ne sait pas trop, il n'a pas pu le lui demander, donc il ne peut pas savoir.
Et puis un jour, il a du partir. Parce qu'à l'horizon, tout a explosé et créé du rouge, et de la boue et du noir, toutes ces couleurs et ces odeurs bien lointaines aujourd'hui qu'il regarde le ciel, étendu dans l'herbe rouge.
Il y a eu du bruit, des odeurs fortes, des cris, du sang, tout ça pêle-mêle, et plus et moins, et il préfère oublier. Et un jour, un papier de libération. Un qui le renvoyait là bas, dans leurs prairies rouges pures.
Il est arrivé, elle n'avait pas du être prévenue, elle n'était pas à la gare. Il a marché jusque chez eux, et tout était fermé. Il a pris le courrier dans la boîte aux lettres, sourire léger. Puis il a feuilleté, il y avait tant de lettres, et il a regardé, il y avait une semaine de lettres, les siennes. Il a couru, il a enfoncé la porte si sombre, et puis elle était là. Souriante.
Souriant à la mort, verte déjà, mais toujours aussi belle, pas comme il aurait aimé la retrouver, pas exactement, mais c'était fait.
Il a juste pris le corps, il l'a mis dans un trou sous le bouleau, là où elle aimait s'asseoir pour lire l'été, et il a juste pleuré. Longtemps ça a duré longtemps.
Maintenant, il ne lui reste que des souvenirs et des nuits dans l'herbe. Demain, il repart là-bas, mais il n'en reviendra pas, parce qu'ici, ici, il n'y a plus rien qui le rappelle. La maison prendra bien soin d'elle sans lui. Juste penser à laisser un mot, pour qu'on vienne le mettre ici. Près d'elle...
Prose de myel, le Samedi 9 Avril 2005, 00:00 dans la rubrique "Jahe".

Commentaires :

Zelia
09-04-05 à 00:16
Tu écris très très joliement. Me suis laissé emportée :)

 
pierredelune
09-04-05 à 01:07

J'avais juste envie... de faire tomber une goutte de pluie.

[J'aurais aimé t'aimer comme on aime le soleil
Te dire que le monde est beau et que c'est beau d'aimer
J'aurais aimé t'écrire le plus beau des poèmes
Et construire un empire juste pour ton sourire
Devenir le soleil pour sécher tes sanglots
Et faire battre le ciel pour un futur plus beau
Mais c'est plus fort que moi
Tu vois je n'y peux rien
Ce monde n'est pas pour moi
Ce monde n'est pas le mien]

Parce que quelque part, ça m'y fait penser.

Magnfique, triste, comme souvent...
Et si on tentait un texte plus joyeux ?


 
myel
09-04-05 à 01:18
Je vais essayer, même si je n'y arrive jamais... mais je vais essayer...

Merci pour la Myel's story, je vais faire de très beaux rêves après avoir lu une si jolie histoire (même si elle est triste)...


 
pierredelune
09-04-05 à 01:37

De rien... En tt cas, j'ai pas trouvé de titre plus original. =)

On verra bien ce que cette histoire donne :)


 
myel
15-04-05 à 12:55
http://myel.joueb.com/news/115.shtml

 
milka301
30-04-05 à 22:27
Argh, quelle violence.

 
myel
30-04-05 à 22:40
Où ça de la violence...?