Il neige. Il neige et l'Ange assis dans la blancheur glacée frissonne. Il regarde la rivière qui coule encore malgré le froid qui emprisonne tout.
La rivière de larmes coule sans cesse, toujours de nouveaux pleurs viennent l'abreuver. Elle est chaude cette rivière là, l'Ange sent toute la souffrance dont elle se nourrit.
Les larmes coulent sur les joues pures, chaudes comme l'eau doit l'être, elles envahissent la peau glacée, et remplissent les yeux d'acier étoilés. Le vent vient tournoyer dans les plumes de l'Ange, comme pour jouer, mais l'Ange ne sait plus rire, plus jouer, plus sourire.
Il est venu là pour chercher le Dernier Amour, la seule chose qu'il reste pour sauver son âme. Il voudrait faire fondre la morte gelée allongée au fond de la rivière. Le Dernier Amour dort sous l'eau depuis la nuit des temps, et l'Ange sait que c'est la seule bonne âme qu'il reste au monde. Il aimerait que les larmes fassent fondre la glace, mais elles semblent oublier leurs pouvoir au contact de cet être frêle et enchanteur qui dort.
L'Ange voudrait mourir, il ne supporte plus le mal et la tristesse déchirante qui se partagent ce monde absurde. Les peurs des hommes l'envahissent. Il est le dernier, le dernier être céleste. Perdu au milieu de ces ombres qui règnent. Il s'allonge dans la neige, et son regard se fond au ciel. Il rêve aux autres qui sont tous morts, et à l'harmonie qu'il aurait voulu voir régner.
Il écrit un mot sur la neige, puis il entre dans l'eau, il va dormir près de l'âme parfaite. Alors que l'eau l'avale, l'autre âme s'en va, la femme au fond de la rivière disparaît, la nouvelle victime est venue.
Dans la neige, il y a écrit un nom, un nom de victime: Samuel.