"Aimer et en souffrir, ça raccroche à la vie en fait.
Comme ça, on a l'impression de vivre pour quelqu'un, même si c'est un amour muet, inutile et douloureux. On est tous un peu mazochistes, non? Non, peit-être pas, moi je le suis."
Il laisse couler le sable qui recouvre le sol de la cellule entre ses mains, plus que quelques heures, il s'en fout. Il doit attendre, et ça l'agace cette attente longue et inutile, souffrance évitable. La lune éclaire les ruelles dehors, le silence règne et lui il attend, il soupire et joue avec le sable qui dort depuis des années sur ce sol qui suinte le désespoir.
"Vaut-il mieux mourir pour l'avis ou pour la vie? Au fond, qu'est ce qui vaut le mieux? Et pour lequel des deux faut-il vivre? L'avis, la vie?"
Quand on est paumé on le reste et on se tait, mais quand on est complètement paumé, on parle, et là, erreur fatale,on a dit un mot de trop, celui qu'il ne fallait pas, et on se retrouve hors la loi pour une raison obscure.
"Et l'amour dans tout ça, ça sert à rien. Enfin un peu à vivre et à ne pas avoir l'avis pour conserver la vie, ça sert à se raccrocher à la vie et pas à l'avis. Pourtant, l'avis c'est ce qui fait changer le monde, enfin si on se débrouille bien, alors que la vie, c'est rien, il y en a pleins d'autres des vies."
L'aube se lève dehors, il a froid, soupire. Quand vont-ils venir lui retirer sa jeunesse? Pourquoi toute cette attente, c'est stupide, et il tremble, de peur? De froid?
Il s'en fout, il attend que la vie s'en aille à cause de l'avis, de toute façon, ça c'est pas bien grave, il savait d'avance que ça se passerait comme ça.
Mais maintenant, il entend les coups de feu dans la coure de la petite prison blanche. Plusieurs détonnations éclatent dans le jour qui naît. Un jour qui naît et des vies qui meurent, c'est comme ça tous les jours, mais ça paraît moins violent de mourir doucement dans des draps sales.
Pas de cris, rien, il essaie de se hisser à la lucarne au niveau du sol. On ne voit rien, le sable de la rue, un chien sauvage qui déguerpit. Il donne un coup de pied dans le sable.
Tiens, les voilà qui descendent, ils en ont mis du temps! Un dernier regard sur la rue où le soleil se lève paresseusement.
"L'avis, la vie? Maintenant ça n'a plus d'importance de toute façon, c'est trop tard, et puis la question se pose pas quand on est dans la cellule, mais avant de montrer qu'on est complètement perdu, non?"

"Pov' gosse quand même, murmure un gardien sur le passage, encore un qui va crever pour rien, y en a encore 10 autres comme lui prêt à recommencer."